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Le Renoncement Heureux

Prendre de bonnes résolutions en début d’année est un grand classique, mais il est plus rare de persister après quelques semaines voire quelques jours dans une saine et nouvelle habitude qu’on voulait se donner.

Cette année, au premier janvier, j’ai décidé en mon for intérieur, comme ça, pour voir ce qui se passerait, de stopper totalement toute consommation d’alcool.

Je n’ai fait aucune annonce, j’ai même attendu plusieurs semaines pour en parler ouvertement à mon épouse, redoutant de subir quelques sarcasmes de sa part concernant cette nouvelle lubie.

Aujourd’hui 5 mois plus tard, je trouve que cette expérience est un vrai succès, et je réfléchis à l’élargir à d’autres activités plaisantes auxquelles je me suis adonné pendant des années, mais qui ont à la longue des effets assez délétères.

Comment ça tu bois plus ?

J’ai une relation un peu spéciale avec l’alcool. Adolescent, j’ai grandi, éloigné par quelques centaines de kilomètres, avec un père alcoolique. À cette époque j’avais énormément peur de lui ressembler.

Étudiant, une fois entré en école de commerce, j’ai docilement suivi le troupeau et participé à toutes les soirées open-bar organisées par les associations étudiantes. Et j’ai passé bon nombre de vendredis matin à cuver. Je pense même que les frais de participations à ces soirées, qui étaient modestes, représentaient une grosse part de mon budget loisirs.

Et puis une fois dans le vrai âge adulte, je veux dire post-diplôme, j’ai eu un mode de consommation d’alcool que certains valorisent comme “sociable” : très peu à la maison, (une biere ou deux par semaine, max), mais à l’opposé beaucoup lorsque l’occasion se présentait : une soirée entre amis, un mariage, une sortie “teambuilding”. À ces moments là je ne me donnais aucune autre limite que celle imposée par la biologie, causant à quelques occasions de réelles inquiétudes à mon épouse.

La première graine de réflexion plantée, qui m’a amené à mon renoncement total aujourd’hui, ce fut cet épisode du podcast Vivons Heureux avant la Fin du Monde de Delphine Saltel  :

À la même période à peu près, je suis tombé sur un épisode au thème similaire dans Au Poste :

Globalement, la chose a été très bien reçue quand j’ai dû expliquer mon refus d’« une petite bière, Philippe ? » à quelques occasions. La seule personne qui a eu quelques réserves ce fut mon épouse, qui n’a jamais je pense eu les mêmes penchants no limit que moi, et qui m’a 2 ou 3 fois dit qu’on pouvait boire avec modération. Elle ne comprend pas bien que pour moi c’est plus facile de consommer zéro que un petit peu. Mais elle reconnaît que c’est plus rassurant de me voir partir à une soirée en sachant que je vais rester très très sobre.

T’aimes pas le ski, comment ça ?

Ne plus remonter sur des skis, c’est encore au stade de la réflexion personnelle mais pas encore exprimée en famille. Mais cet hiver au mois de mars, lorsque j’ai rendu mes skis de location, je me suis dit que c’était la dernière fois que je monterai sur des skis.

Descendre ces pistes, toujours les mêmes, entouré de vacanciers, culpabilisant sur les impacts environnementaux de ce loisir de gros bourge, je n’y prends plus aucun plaisir. J’ai passé les 2 derniers jours de la semaine de vacances à bouquiner au chalet pendant que Madame et les enfants y retournaient, et c’est le régime que je vais choisir pour les futures vacances je pense.

T’es plus un gamer ?

S’il y a un loisir que j’ai maintenu depuis mes 8 ans, c’est le gaming. J’ai eu pratiquement toutes les consoles Nintendo, et à part la NES et la GameCube je les ai toujours sous la main, j’ai probablement autour d’une soixantaine de jeux switch (en fait non, rien qu’en dématérialisé, j’en ai 132 d’après le site de Nintendo, plus une douzaine de cartouches à la maison, c’est plus de 2 fois ce que je pensais), plus steam sur l’ordi.

J’ai cependant de moins en moins de plaisir à jouer, et je constate que ma consommation de jeux vidéo à dérivé progressivement vers des jeux que je maîtrise parfaitement, qui sont un peu répétitifs ou grindy (Slay the Spire, Pokémon anciens) mais que je peux jouer de manière un peu distraite en écoutant des Podcasts ou des vidéos YouTube en parallèle. Ça trompe l’ennui sans demander beaucoup de concentration ni d’engagement, mais au final ça n’a pas de saveur, et pourtant j’y revenais et même ça pouvait être le truc qui me fait sortir du lit tôt le matin un week-end.

Insatisfait, j’ai passé pas mal de temps et dépensé pas mal d’argent à rechercher le prochain jeu qui comblera le manque, le jeu qui me reconsumera, comme Slay the Spire a pu le faire, et Guild Wars 1 15 ans avant lui.

Mais la meilleure solution semble en fait de renoncer à jouer, en tout cas dans ce mode là. Je ne m’interdis pas totalement de jouer à un jeu dans mon gros backlog, mais plus de nième run Pokémon old school avec YouTube en fond, c’est vraiment préférable, j’ai aussi un gros backlog de bouquins à lire et je sens bien que mon attention est plus difficile à mobiliser à force de céder à ce genre de sirènes.

YouTube

À propos des vidéos YouTube, j’ai clairement une addiction. Dès que j’ai une activité basse tension de plus de 3 minutes devant moi :

  • aller au toilettes
  • faire la vaisselle
  • me brosser les dents
  • cuisiner
  • passer l’aspirateur
  • prendre mon café

hop, YouTube, dans un navigateur avec u-block, histoire de ne pas avoir de pub (à part les segments sponsorisés qui sont devenus très nombreux). Ne pas le faire est inenvisageable, une espèce de torture mentale.

J’ai à plusieurs reprises installé une extension de navigateur pour me bloquer l’accès à YouTube mais à chaque fois je craque et je la retire.

C’est pénible parce qu’il y a d’excellents contenus sur YouTube, et c’est triste mais c’est devenu je pense ma principale source d’information, mais l’algorithme nous pousse très brutalement à regarder immédiatement d’autres vidéos similaires à celles qu’on vient juste de mater, et on peut rapidement être un peu submergé par un thème, souvent déprimant, si on se laisse porter par les suggestions.

Donc sur ce terrain là, je n’ai pas encore réussi, mais j’y réfléchis encore. Passer à un mode d’information plus lent, moins immédiat serait peut-être meilleur pour mon équilibre, mais j’y perdrais sûrement tous les sujets de niche qui me plaisent comme les jeux de rôle, le skateboard, la politique américaine.

One last thing

Il y a une autre forme de plaisir solitaire à laquelle j’ai renoncé totalement, mais c’est trop personnel pour évoquer la chose, ses raisons, et les conséquences positives ici. Je l’évoque juste pour mon futur lecteur, moi-même dans plusieurs années, il se souviendra sans doute.

Conclusion

La “grande” sagesse de tout ça, c’est qu’il y a un grand nombre de plaisirs néfastes auxquels on s’habitue et qu’il est parfois difficile de dire non, mais qu’il existe des plaisirs supérieurs, que l’on n’éprouve au prix d’un certain effort, d’un moment de concentration, ou simplement d’un petit peu d’attente. Le coût est moins élevé qu’on ne le pense initialement, et la récompense vaut vraiment le coup.

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